Culture

Benoît : « Le break dance, c'est le respect de l'autre »

3 février 2014

© K.Weber

A 24 ans, Benoît Callens a une vie déjà bien remplie : parallèlement à ses études universitaires en gestion, le jeune Mouscronnois s'est adonné à sa passion qu'est le break dance. Apparemment paradoxal, ce choix est en réalité le fruit d'une mûre réflexion et absolument pas dénué de bon sens. Aujourd'hui, il s'entraîne toujours avec son crew (comprenez : son groupe), les « Univers City Breakers », dont le nom est un petit clin d'œil à la cité universitaire de Louvain-la-Neuve où le breaker de talent a passé les six dernières années de sa vie.

 

« L’un des moteurs majeurs de cette danse est l’originalité et la créativité »

 

Attiré depuis toujours par le break dance ou le « B-boying » comme on l’appelle dans le milieu, Benoît a pourtant un peu hésité avant de se jeter corps et âme dans la pratique de cette danse. Des gens virevoltant dans l’air en appui sur une main, tournoyant sur leur tête… toutes ces acrobaties ont, dans un premier temps, laissé l’adolescent pantois. Mais à l’âge de 15 ans, alors qu’il est devant son poste de télévision en train de regarder « The Wade Robson Project », le programme de MTV qui a révélé de nombreux danseurs auparavant inconnus du grand public, Benoît commence à s’y intéresser. De plus en plus impressionné par ces épreuves d’improvisation, le jeune homme tente de reproduire les chorégraphies qu’il voit dans son petit écran. Le déclic se produit alors. Un an de cours et de persévérance plus tard, Benoît n’est plus le même jeune homme. « Avant, je ne savais même pas faire une roue et j’avais quelques difficultés pour faire un cumulet », avoue-t-il dans un éclat de rire. Mais au fur et à mesure des entraînements, les gestes se précisent et les mouvements se fluidifient. Il estime alors que les bases qu’il a acquises suffisent. « Par la suite, j’ai continué tout seul, ce qui n’est pas très dérangeant puisque l’un des moteurs majeurs de cette danse est l’originalité et la créativité. Du coup, même sans prof, tu peux assez aisément te développer dans cette danse ».

 

Une solidarité qui ne trompe pas

 

Ce qui a tout de suite attiré son attention dans le break dance, c’est le côté spectaculaire de ses figures au sol. Mais au-delà de cet « amas de figures acrobatiques », le breaker se rend vite compte que cette danse a bien plus à lui offrir : son aspect social. Selon lui, les liens qui unissent les danseurs sont authentiques et forts : « il existe incontestablement une certaine fraternité entre nous. Je vois souvent des personnes non initiées qui sont très étonnées de la convivialité régnant dans notre milieu. Le break m’a permis de faire de belles rencontres ». A en croire Benoît, si la compétition existe bel et bien, elle est saine et complètement avouée, ce qui, d’emblée, permet d’évacuer les éventuelles tensions. « Lorsque je m’entraîne avec des amis, il y a toujours ce petit "je ferai mieux que toi". Un danseur rentre, le suivant va essayer de donner encore plus que le premier », lance-t-il, un brin espiègle. Mais de rajouter : « du petit novice au pionnier en passant par l’adversaire en battle, le break, c’est le respect de l’autre ».

 

Le break, une danse au potentiel fédérateur indéniable

 

En vrai passionné, le break dancer s’entraîne jusqu’à quatre fois par semaine. Mais son investissement ne s’arrête pas là : totalement immergé dans le milieu du hip hop, il est toujours au courant des dernières actualités sur le break dont il est chaque jour un peu plus amoureux. Il a même co-organisé une compétition de hip hop, l’« UCL Dance Contest », en partenariat avec le Service des Sports de l’université où il a étudié. Convaincu du potentiel fédérateur du break, Benoît met un point d’honneur à faire découvrir et promouvoir cette culture auprès des profanes, y compris des seniors « qui sont ressortis de la salle des étoiles dans les yeux », précise-t-il fièrement. « De manière globale, c’est un art qui fait se rencontrer les gens, plutôt que les séparer ». Un défi relevé haut la main avec l’UCL Dance Contest qui a rassemblé de nombreuses équipes venues des quatre coins de la Belgique.

 

« C’est un peu comme une drogue. Quand on a commencé, c’est difficile de s’arrêter »

 

Cet événement a aussi été pour lui l’occasion de prouver qu’il était capable de mettre en application les connaissances acquises sur les bancs de l’université : « mes études en management m’ont permis d’ajouter une corde à mon arc ». Car comme il le rappelle justement, se lancer dans une carrière artistique est une aventure risquée, surtout dans le milieu du hip hop : « il existe de nombreux talents mais trop peu réussissent à en vivre réellement ». Beaucoup choisissent alors la raison et optent pour une voie professionnelle plus sage. Benoît fait partie de ceux-là. Quand le jeune homme jette un coup d’œil dans le rétroviseur de sa vie, c’est sans aucun regret qu’il le fait. « J’ai également beaucoup apprécié faire des études. Et puis, peut-être que lorsque ce n'est plus une passion mais un travail, cela perd un peu de son éclat… », se demande-t-il, songeur. Même s’il ne sait pas encore où la vie l’aura emmené dans dix ou vingt ans, une chose semble certaine : son amour pour le break dance n’a pas fini de lui faire tourner la tête… « Je pense que c’est un peu comme une drogue. Quand on a commencé, c’est difficile de s’arrêter ».

 

Sang-Sang Wu