Relations
Didier, fier papa engagé pour la reconnaissance des familles homoparentales
28 mars 2018
© Didier
Didier est devenu l'une des figures de l'asbl « Homoparentalités ». Inspiré de son expérience personnelle, il mène chaque jour un combat pour une reconnaissance plus juste des familles homoparentales.
Il est sept heures du matin quand le réveil sonne, annonçant au couple le début d’une nouvelle journée. Les enfants sont déjà debout et commencent à se préparer pour leur journée d’école pendant que leurs parents préparent le petit déjeuner. Après une bonne journée de travail, comme chaque soir, les parents accompagnés de leurs deux enfants se retrouvent autour d’un bon repas. Cette famille, c’est celle de Didier, Éric et leurs deux enfants. La vie de Monsieur et Monsieur tout le monde en somme. Alors pourquoi faire encore une différence avec d’autres familles ?
Une implication croissante au sein de l’asbl
En 2006, Didier et Éric envisagent d’agrandir la famille. Outre le désir d’enfant, ces deux papas s’inquiètent de la place de leur famille un peu atypique aux yeux de la société. Ils décident alors de participer aux activités de l’asbl « Homoparentalités ». Au fil du temps et des rencontres, Didier s’investit davantage au sein de l’association pour contribuer, à son échelle, à la reconnaissance des familles homoparentales et, plus largement, à la lutte contre les discriminations. « Ça entre dans une idée plus vaste d’une société où chacun est ce qu’il est pour son plus grand bien et pour le bien de tous » explique-t-il. Il s’implique donc au sein de l’ASBL jusqu’à devenir le Président du conseil d’administration. Aujourd’hui, il passe le relais à d’autres tout en restant actif pour un combat qui lui tient à cœur.
Rendre la maison habitable : reconnaître le coparent
Depuis son arrivée au sein de l’association, il a pu observer un bon nombre d’avancées qui permettent aux familles homoparentales de se sentir de plus en plus intégrées au sein de notre société. « Le plus gros du travail est fait, la structure est présente et maintenant, il s’agit de rendre la maison plus jolie et plus habitable ». La dernière avancée significative concerne la loi de 2014 relative à l’établissement de la filiation coparente[1] pour les couples lesbiens. Cependant, la double paternité n’est pas encore reconnue de la même façon, ce qui génère un sentiment d’injustice. Cette thématique est importante pour à Didier car elle est étroitement liée à la procédure de Gestation Pour Autrui (GPA)[2]. Selon lui, admettre qu’un deuxième papa puisse reconnaître l’enfant avant la naissance implique indirectement une reconnaissance de la GPA. Cette dernière, bien que tolérée en Belgique, n’est pas formellement autorisée.
Didier a pu prendre pleinement conscience des difficultés que cela impliquait puisque c’est de la sorte que son couple est devenu papa à deux reprises. Ne pas reconnaître le coparent revient à priver l’enfant de son parent légal le temps que le couple passe par une autre procédure comme l’adoption intrafamiliale.
« Techniquement, l’école aurait pu me demander de signer une procuration pour que mon mari puisse venir chercher les enfants mais ils ne l’ont jamais fait. Nous n’avons jamais dû nous présenter aux urgences mais si c’était le cas, mon mari n’était pas habilité à prendre des décisions d’ordre médical sur ses propres enfants, par exemple. Nous sommes passés au travers de tout ça car les circonstances étaient favorables. Mais c’est un risque que les familles homoparentales ne devraient pas avoir à subir plus que n’importe quelle autre » explique-t-il.
Ce sont des exemples parmi d’autres qui rendent cette période particulièrement délicate et crée un sentiment d’injustice chez ces papas. Et pourtant, Didier est convaincu que cette pratique, une fois bien encadrée, pourra permettre à chacun de s’y retrouver et de vivre une histoire fantastique comme la sienne. « La GPA a considérablement enrichi nos familles, tant celle de la mère porteuse que la nôtre » explique-t-il, en ajoutant qu’encore cette année, ils se sont retrouvés pour fêter Noël ensemble.
Didier suit également de près les problématiques liées aux couples homosexuels/internationaux. Les difficultés administratives liées à ce statut, le couple les connait pour les avoir vécues. Il souligne qu’en Belgique et aux États-Unis, il y a moins de problèmes de reconnaissance qu'ailleurs. Mais certains couples peuvent traverser bon nombre de difficultés pour faire reconnaître leur enfant comme étant le leur, même en Europe. « Et ça, ça ne va pas ! » déclare-t-il. « Comment imaginer qu’une famille ne puisse être reconnue comme telle pour le seul motif d’un passage de frontière ? »
À côté de cela s’ajoutent encore de nombreux combats sociétaux tels que la nécessité d’adapter les formulaires administratifs, ou les fêtes familiales qui ne correspondent plus à la diversité des modèles familiaux actuels. Mais Didier tient à ajouter que le fait d’être homoparent n’empêche pas de rencontrer des situations très diversifiées au sein même de l’association : « Oui, on est homoparent mais ça ne veut pas dire qu’on vit de la même façon, qu’on a le même niveau socio-économique, socio-culturel, etc. C’est une société en soi avec des origines différentes, des sexes différents, le vécu de chacun, l’âge qui diffère. Même si c’est un point commun, ce n’est pas suffisant et ça peut donner lieu à des débats assez virulents sur ce qu’il convient de faire. ». Au fond, il rappelle également que s’engager au sein de l’association lui a permis de faire beaucoup de rencontres qui rendent le travail si passionnant au quotidien.
Un combat pour tous
À travers l’histoire de Didier, il est facile de comprendre comment l’histoire personnelle influence l’implication au sein d’un projet qui nous parle et auquel nous pouvons nous identifier. La lutte contre les discriminations concerne tout le monde au vu de la société de plus en plus diversifiée au sein de laquelle nous évoluons. Actuellement, il n’existe plus de modèle familial unique mais un enfant peut avoir un parent, deux parents qui sont homosexuels ou hétérosexuels, d’origine ethnique différente ou identique. Il peut être élevé par d’autres personnes que ses parents…
Pour son bien-être et celui de sa famille, chacun a l’opportunité de veiller à ce que tous se sentent bien dans leur milieu de vie et de ne pas laisser ce combat uniquement aux personnes qui le vivent. Pourquoi ne pas devenir acteur du changement ? Cela peut commencer par ne pas émettre de jugement sur une situation que nous ne connaissons pas ou peu et de se renseigner sur ce qui nous pose question ou encore, d’aller à la rencontre de ces personnes qui peuvent paraître un peu différente au premier abord.
[1] “ Le lien de filiation peut être établi par application de la présomption de comaternité ou par reconnaissance. Le juge peut établir la comaternité lorsque la filiation n’est établie ni sur base de la présomption de comaternité ni par reconnaissance” - https://justice.belgium.be/fr/nouvelles/autres_communiques/news_2014-12-23_2, consulté 20/03/18.
[2] La gestation-pour-autrui est « la pratique par laquelle une femme porte un fœtus ou un enfant, et poursuit la grossesse jusqu’à la naissance de cet enfant avec l’intention de transférer ensuite tous ses droits et devoirs parentaux au(x) parent(s) demandeur(s) » - http://www.actualitesdroitbelge.be/droit-de-la-famille/droit-de-la-famille-abreges-juridiques/la-gestation-pour-autrui/la-gestation-pour-autrui - consulté 20/03/18.
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Oliviero est engagé depuis plusieurs années dans la défense des droits LGBT à Bruxelles. Dans un contexte national et international de plus en plus préoccupant, où migrations et conflits reviennent quotidiennement sur le devant de la scène, il insiste sur la pertinence d'une perspective croisant racisme et homophobie, ainsi que sur la nécessité de protéger « la minorité dans la minorité ». Depuis les locaux de la RainbowHouse dont il est désormais le porte-parole, il nous parle de sa mission dans une ville comme Bruxelles.