Relations
Questions d'orientation sexuelle et de genre ? Et si on écoutait les personnes sourdes !
28 mars 2018
Il s'appelle Dylan Thirion. Il est en deuxième année d'études pour devenir éducateur spécialisé en accompagnement psycho-éducatif. Il est sourd. Il porte un implant cochléaire qui lui permet de capter les sons. Depuis novembre, il est secrétaire et responsable média auprès d'une association qui s'appelle LGBTSU. Celle-ci vise la population sourde LGBT : Lesbiennes, Gays, Bisexuels, Trans, Questionnement, Intersexes.
Comment t’identifies-tu dans cette communauté ?
Je suis gay.
Comment ton coming-out s’est-il déroulé ?
Mon coming-out s’est bien passé, même si au départ, j’imaginais le pire. J’ai commencé à en parler à mes amis proches qui sont aussi sourds. Ils m’ont tout de suite soutenu et ils m’ont rassuré en me disant qu’ils seraient toujours là pour moi.
Leur soutien m’a donné la force et l’énergie de le dire d’abord à ma maman, qui l’a très bien accepté. « Tant que tu es heureux, c’est le principal » m’a-t-elle dit... J’ai demandé à ma maman de le dire elle-même à mon père car je n’osais pas le faire . Elle l’a fait et quelques jours après, mon papa est venu me dire la même phrase que ma maman. Elle a aussi informé le reste de ma famille : il est difficile de rassembler tout le monde et de faire son coming-out devant tant de personnes.
Comme tout s’est bien déroulé dans mon entourage proche, j’ai publié une photo sur les réseaux sociaux avec comme description : « Je suis gay. Et alors ? Si c'est un problème pour vous. J'ai la solution : c’est vous le problème ». Suite à ça, je n'ai reçu que des commentaires positifs.
Comment cela a pu influencer ta vie, tes relations sociales ?
Cela a énormément changé ma vie quotidienne. Je ne me cache plus. Comme j’assume davantage mon identité, il est plus facile de discuter de ces thèmes-là. Autre chose importante, on ne me demande plus : « Alors, tu as une copine ? » mais on me dit plutôt :
« Alors, tu as un copain ? ». Là, je me sens mieux et j’aborde sans gêne la discussion avec la personne.
Est-ce important pour toi de faire partie d’un groupe, de connaître dans ton entourage des personnes LGBT ?
Il faut savoir que pour moi, il n’est pas indispensable de faire partie d’un groupe LGBT. J’ai énormément d’ami·e·s qui sont hétérosexuel·le·s qui m’acceptent tel que je suis. J’ai une amie lesbienne. C’est évidemment plus facile de discuter de questions d’orientation sexuelle et d’identité de genre vu qu’elle fait également partie des communautés LGBT. Mais rien ne m’empêche de m’intégrer dans un groupe d’hétérosexuels.
Ta surdité a-t-elle été un frein à ton intégration au sein d’un de ces groupes ?
Je n’ai jamais été confronté à un problème d’intégration jusqu’à présent. La plupart des gens sont souvent impressionnés vu que ce sont deux combats que je mène de front. Ils me posent auant de questions sur le monde des sourds que sur les communautés LGBT.
Est-ce que le fait d’être gay a influencé ton intégration au sein de la communauté sourde ?
Selon moi, la communauté sourde a une intuition très remarquable, du coup, beaucoup de personnes avaient remarqué que j’étais gay bien avant mon coming-out. Lorsque j’ai fait mon coming-out, mes ami·e·s sourd·e·s étaient content·e·s que je m’assume et sois bien dans ma peau. Il faut savoir que la population sourde est plus ouverte face à çà, ils n’ont pas de problème avec ceci.
Récemment, le « LGBTSU » s’est créé. Pourquoi penses-tu qu’il est important de créer une communauté LGBT pour les sourd·e·s ?
Pour moi, c’est important car la communauté sourde LGBT est minuscule par rapport au reste de la population. Il y a un manque énorme d’accès à l’information puisque les personnes sourdes n’écoutent pas la radio ou le journal à la télévision.
Les buts premiers sont :
- Représenter des personnes sourdes LGBT qui malgré un parcours difficile ont une situation de vie stable actuellement.
- Encourager les personnes sourdes qui ne s’assument pas encore et qui ont besoin d’un espace de parole et de rencontre.
- Renseigner et informer les personnes sourdes LGBTQI+.
En conclusion de cette interview, que penses-tu qu’il manque aujourd’hui dans notre société belge pour une meilleure représentation des personnes sourdes, des personnes LGBT ?
Par rapport à la communauté sourde, il existe aujourd’hui encore beaucoup de présupposés. Par exemple, on parle souvent de « sourd-muet ». En conséquence, beaucoup de personnes entendantes sont étonnées de m’entendre parler lorsque je les rencontre pour la première fois. Pourtant être sourd n’empêche pas d’utiliser sa voix. C’est une représentation de la population sourde encore très présente aujourd’hui.
Dans d’autres domaines, il existe surtout un manque criant d’accessibilité. Dans l’enseignement supérieur, où j’étudie maintenant, il manque d’interprètes ou d’aides spécifiques pour les personnes sourdes. Ces aménagements sont pourtant importants pour notre apprentissage.
Dans le domaine de la musique aussi les personnes sourdes sont discriminées. Avec mon implant cochléaire, j’ai la chance de pouvoir entendre. Je trouve dommage que beaucoup de personnes sourdes n’aient pas accès à cet aspect du monde. La musique a vraiment une place importante dans ma vie. Quand j’étais plus jeune, j’ai voulu apprendre le piano. Lorsque j’ai voulu m’inscrire à l’académie de musique on a refusé de m’accepter à cause de ma surdité. Pourtant, j’ai un ami sourd qui joue du violon et c’est merveilleux à entendre !
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Oliviero est engagé depuis plusieurs années dans la défense des droits LGBT à Bruxelles. Dans un contexte national et international de plus en plus préoccupant, où migrations et conflits reviennent quotidiennement sur le devant de la scène, il insiste sur la pertinence d'une perspective croisant racisme et homophobie, ainsi que sur la nécessité de protéger « la minorité dans la minorité ». Depuis les locaux de la RainbowHouse dont il est désormais le porte-parole, il nous parle de sa mission dans une ville comme Bruxelles.